Rituel de Chair

Auteur: Graham Masterton

Titre original: Ritual / Feast

Traducteur: Jean-Daniel Brèque

Editions: Pocket 

Genre: Terreur

Date de parution: 1992

RésuméRestaurant anthropophage
Mérite le détour.
Il est prudent de réserver.

Lorsqu'on est critique gastronomique et que, l'on a fini par se lasser de la cuisine médiocre que proposent les auberges américaines, on se sent plein d'appétit en apprenant l'existence, au fin fond du Connecticut, d'un restaurant français très fermé qui, attrait supplémentaire, ne figure sur aucun guide.
Aussi Charlie McLean n'aura-t-il de cesse de s'y faire admettre. Mais pour la secte qui tient le « Reposoir », la cuisine n'est pas seulement un art, c'est une véritable religion à laquelle on se dévoue.. corps et âmes.
Et chacun doit donner du sien.


Si Rituel de Chair promet une histoire horrifique, le résultat n'est guère convaincant. Le thème abordé est intéressant en lui-même puisqu'il touche à un interdit et à une pratique terrible, mais son développement est inégal et finit par tomber dans le grotesque.
Le début commence bien et se focalise directement sur la relation père-fils, qui est assez compliquée. Masterton parvient à donner un vrai relief à cette relation tendue, montrant dès le départ que cette dernière aura une importance capitale dans son récit. Il n'hésite pas par ailleurs à également faire entrer une pointe de fantastique dès ces premières pages, nous plongeant ainsi dans une ambiance dérangeante, contribuée par un climat triste et pluvieux. On se rend compte rapidement que les personnages ne sont pas heureux. Le père, Charlie, est blasé par sa vie, il se laisse conduire par les évènements, ne prenant jamais d’initiatives ce qui énerve et laisse interloqué son fils. Les deux ont du mal à communiquer mais les choses empirent quelque peu à la suite de la mention d’un restaurant particulier. Entre les questionnements du père sur sa vie et sa relation avec son fils, on fait alors connaissance avec le mystérieux restaurant, où il faut absolument être convié ou être un membre pour y manger. Impossible d’imaginer un tel refus pour un critique gastronomique comme Charlie, qui d’un coup devient comme obsédé par le restaurant.
C’est alors que tout bascule, et l'histoire devient alors inégale. Entre moments rythmés et nerveux se déroulent des moments beaucoup plus lents, presque ennuyeux. L’écriture de Masterton est agréable, jonglant entre descriptions un peu longues et scènes très gores. Mais les dialogues sont quelques peu étranges, donnant parfois l'impression d'être décalés, non naturels.
Les personnages sont pas mal, le plus intéressant restant bien sûr le père, qui évolue au long de l'intrigue pour enfin trouver sa voie, lui qui n'avait aucun but dans sa vie. Il y a par contre un énorme problème avec Martin le fils : d’où provient sa soudaine envie de faire partie des Célestins ? Lui qui clamait à son père qu’il fallait s’éloigner du restaurant, qui semblait avoir peur de ce dernier, le voilà lobotomisé comme un brave mouton qui s’oppose à son père. Son comportement n’est absolument pas crédible, contribuant au côté inégal du récit. Les Célestins sont intrigants, mais incompréhensibles. Ils représentent bien les membres d’une secte, incapables de réfléchir par eux-mêmes, croyant à une interprétation loufoque de la Bible. Mais à travers ses personnages et celui de Martin se pose la question du rôle des parents: quel est-il? Notamment du point de vue spirituel. N'est-il pas celui de donner de l'esprit à leur progéniture? Si le propos de fond du roman est intelligent, il se perd à travers une sorte de road movie sanglant qui en choquera certains.

La fin reste le plus gros point négatif. Alors que jusque là le récit restait à peu près cohérent, Masterton a choisi d’introduire réellement du fantastique, transformant la résolution du récit en une fin grotesque et facile qui gâche tout. Quant à la dernière page, on se retrouve face à une scène ridicule qui tient de l’impossible et discrédite au final les aventures de Charlie. Il est dommage que Masterton ait basculé dans cette facilité, car l’histoire malgré ses points négatifs se laisse lire facilement.  

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